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Article 4 – Inopposabilité et nullité des rapports d’expertise judiciaire

Cour de cassation, 3ème Civ., 20 octobre 2021, n° 20-18.171 F-D - La société Techni-Isol c. Société Château de Vincennes

« Faits et procédure

2. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 15 janvier 2020), la société civile immobilière (SCI) Vincennes a entrepris la rénovation lourde d’un immeuble composé de plusieurs bâtiments.

3. La pose des plafonds suspendus a été confiée à la société Techni-Isol.

4. En 1991, la SCI Vincennes a vendu l’immeuble en l’état futur d’achèvement à la SCI Château de Vincennes, aux droits de laquelle vient la société civile du Passage Genty.

5. La réception a été prononcée en 1992.

6. En 2002, la SCI Château de Vincennes a assigné différents constructeurs et assureurs, pour obtenir réparation de désordres liés, notamment, à l’effondrement des faux plafonds. »

La société civile immobilière de Vincennes a entrepris la rénovation d’un immeuble composé de plusieurs bâtiments. Pour ce faire, elle a confié à la société Techni-Isol la pose des plafonds suspendus.

L’ensemble du bien immeuble est vendu en l’état futur d’achèvement à la SCI Château de Vincennes en 1991 et la réception est prononcée en 1992.

En 2002, la SCI Château de Vincennes a assigné des constructeurs et leurs assureurs après la survenance de plusieurs désordres et la chute des faux plafonds.

La société Techni-Isol va être condamnée in solidum à relever et garantir l’assureur dommages-ouvrage de la condamnation prononcée au titre des désordres.

Or, cette même société soutient que l’expertise judiciaire sur laquelle est fondée sa condamnation ne lui était pas opposable. En effet, l’expert judiciaire aurait classé la société Techni-Isol parmi celles n’étant pas concernées par l’expertise.

De ce fait, la société requérante maintenait que les mesures d’expertise judiciaire n’avaient pas été réalisées à son contradictoire et que l’expert n’a jamais jugé bon de rectifier son erreur par la suite.

Or, la Cour d’appel a refusé de déclarer l’expertise judiciaire inopposable à la société Techni-Isol et par conséquent de la mettre hors de cause.

Le pourvoi formé par ladite société est rejeté.

La Cour de cassation considère :

« 10. Les parties à une instance au cours de laquelle une expertise judiciaire a été ordonnée ne peuvent invoquer l’inopposabilité du rapport d’expertise en raison d’irrégularités affectant le déroulement des opérations d’expertise, lesquelles sont sanctionnées selon les dispositions de l’article 175 du code de procédure civile qui renvoient aux règles régissant les nullités des actes de procédure.

11. En l’absence de demande d’annulation des rapports d’expertise, la cour d’appel, constatant que leur contenu avait pu être débattu contradictoirement devant elle et appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à son examen, a pu se fonder sur les appréciations de l’expert pour juger que la société Techni-Isol était responsable d’une partie des dommages. »

Le principe du contradictoire est un principe général du droit présent en procédure civile, pénale, administrative et disciplinaire. Tout expert judiciaire doit veiller au respect de ce principe et les mesures d’expertise ne sont opposables qu’aux parties présentes ou représentées.

Or, si une expertise est irrégulière, une partie à l’instance ne peut pas seulement évoquer une inopposabilité des mesures à son égard, elle doit invoquer la nullité des opérations.

Ainsi, les rapports d’expertise judiciaire sont opposables à tous les constructeurs intervenant sur le chantier litigieux dès lors qu’ils n’en demandent pas la nullité.